Twitter est, à mon avis, le meilleur moyen de communication lorsqu’il s’agit de donner une certaine exposition médiatique à un sujet  et susciter l’attention d’internautes situés de part et d’autre du monde pour un sujet donné.  Il suffit que ce dernier soit jugé digne d’intérêt par les twittos, ou qu’il constitue une voie royale permettant à l’internaute d’attirer l’attention sur lui pour la magie virale s’opère et que, quelques minutes plus tard, convergent sous la bannière du « hashtag’ une multitude de voltigeurs du clavier, ainsi qu’une masse considérable de tweets, vidéos, photos et de contenus multimédia plus ou moins liés au sujet.
Dernier exemple en date du 6 mars 2015 : le #Blackoutday. 
Cette initiative de « la fierté noire » et de la « beauté noire »était destinée à attirer l’attention du reste du monde sur la “différence black », la « black pride », ainsi que son absence sur un web qui lave et efface à l’eau de javel tout ce qui n’est pas assez blanc .
Ça été une véritable déferlante de tweets et retweets, au point ou le hashtag concerné a été classé numéro un sur Twitter, et ce durant toute la journée du 6 mars.  On peut donc raisonnablement penser les vagues de positivité déversées par les twittos adeptes du Black Out Day ont contribué à améliorer l’image de la beauté noire sur le web , n’est ce pas ?
Non. Pas vraiment.
Lors de ce « noircissement du web », un bien triste spectacle est apparu à la lumière du jour.
En effet, là où on s’attendait à voir des contenus et images relatives aux actions positives, au respect de soi, à l’abnégation et à la réussite en dépit des circonstances complexes avec lesquelles les noirs doivent composer tous les jours … Nous avons a eu droit à la grande fête du « Selfie Black ».
Jugez par vous même. Attention, certaines des photos publiées sous ce hashtag sont vraiment osées et pourraient être classées dans la catégorie NSFW .
Somme toute, le Black Out Day, ça surtout été ça : des selfies, des duckface selfies, des selfies sexy, des selfies vulgaires. Il y a aussi eu des clichés dignes d’un pre shoot de film pornographique, et ceux avec des adolescents dans des poses suggestives et/ou en petite tenue, en face du miroir d’une salle de bain . Bon, il y a bien une petite centaine de personnes qui ont essayé de faire passer des messages positifs, mais bon apparemment, ça n’intéressait pas grand monde…
Finalement, il n’a manqué que le twerk en l’honneur du Black Out Day (… pitié, dites moi que ce n’est pas arrivé … ) pour que la boucle soit bouclée, et la honte totale.  Il ne s’agit même pas ici d’une victoire à la Pyrrhus ou à la Gbéhanzin, mais d’une défaite totale :
Le monde retiendra que le 6 mars 2015, lorsque les  noirs  ont un hashtag dédié, ils s’en sont servis pour flatter leur égo.
C’est vraiment dommage : La seule fois qu’un hashtag  concernant le peuple noir est relatif à un sujet autre que des guerres, des émeutes, des évènements sportifs – ou le nouvel album de Kendrick Lamar –  passe en trending topic, ces messieurs/dames s’en servent pour donner de la visibilité des activités aussi banales que leurs selfies et leurs poses de mannequin de salle de bain ?
Est ce que le sens des priorités des internautes se réclamant de la “Black Pride” est à ce point faussé ?
Sérieusement, mesdames du #blackoutday, oui, je m’adresse à particulier à vous , en quoi le fait de faire savoir au monde que vous pensez être jolie, que vous avez des formes généreuses apporte quelque chose de positif à l’image de la femme noire sur le web ? Ne trouvez vous pas que les résultats de recherche relatifs aux termes « attractive black woman » sont déjà assez accablants ?  Soit dit en passant, il me semble que le point ici était la célébration de la beauté noire : au vu des photos, il me semble que le rapport tissages+faux cheveux / cheveux crépus était supérieur à 1 . Mais il s’agit là d’un autre débat.
Quant aux autres, je sais que les choses vont vite de nos jours, mais la dernière fois que j’ai vérifié, il n’y a pas longtemps de cela, un selfie n’était pas un acte révolutionnaire.
Tous, faites moi plaisir, remixez le Black Out Day lors de sa prochaine édition : montrez que vous êtes le premier à arriver au bureau, et le dernier à en partir, et que ce faisant, vous mettez à mal le cliché de l’homme noir paresseux. Montrez comment votre argent supporte des affaires montées par vos « frères et soeurs » de couleur .  Au lieu d’un enième meme se payant la tête de Donna Goudeau ou de Suge Knight, montrez nous des images de vous entrain d’oeuvrer pour empêcher  les noirs de s’entretuer pour une paire de Jordans, des coins de rue ou pour avoir débuté une rixe depuis facebook
Mieux, organisez un WorldStar Hip Hop Boycott Day ( celui là, vous pouvez même l’organiser 365 jours / an, 24 heures/jour) , mais de grâce, lors du prochain Black Out Day, utilisez l’exposition médiatique pour faire une réelle différence.

Jean Luc Houedanou